Épisode 2 : que va devenir le monde du spectacle et des arts ?
Alors que nous allons rentrer dans la phase deux du confinement et que la plupart des activités reprennent, un grand silence entoure le monde de l’art avec les musées encore fermés et tous les évènements artistiques et culturels annulés pour cette année.
Et, pourtant, il s’agit d’un secteur extrêmement porteur pour notre économie.
Selon une étude de 2019 menée par EY (« 3e Panorama des Industries Culturelles et Créatives en France ») l’industrie Culturelle et Créative a un poids pour l’hexagone comparable à celui de l’industrie agroalimentaire et 1,9 fois plus important que celui de l’industrie automobile : 47,5 mds € de VA.
Un marché en croissance continue dans les derniers 5 ans : 91,4 Mds € et + 6,7% en 2018, et un vecteur majeur d’exportation : les exportations des ICC avaient cru 2 fois plus vite que l’ensemble des exportations françaises déjà entre 2013 et 2016 et 52 M de touristes ont vécu une expérience culturelle dans notre pays en 2018. Un véritable moteur pour l’économie française.
Un moteur de l’économie actuellement à l’arrêt.
Il y a un monde avant et un monde après coronavirus qui recommence par la data, la réalité virtuelle et la 3D ?
Que va devenir le monde du spectacle et des arts dans l’ère du coronavirus ? Comment va-t-il se réinventer ?
Si dans le monde d’« avant » la transformation digitale avait produit un impact inégal dans ce secteur et la data et la technologie commençaient à faire leur percée, l’« après » connaîtra sans doute une accélération dans ce sens.
La donnée constituera le premier terrain d’innovation à privilégier.
La connaissance et l’anticipation des choix des publics et de l’audience étaient déjà devenues des enjeux majeurs pour les acteurs de l’économie créative : la collecte, la maîtrise et la valorisation de la data sont aujourd’hui indispensables pour tout acteur du secteur afin de partager la culture avec le plus large nombre et proposer une expérience unique aux visiteurs.
L’exemple : la start-up Delight-Data propose une solution d’analyse comportementale des goûts des spectateurs du secteur du spectacle vivant à travers la compilation de leurs données de billetterie complétée par des recherches sémantiques. L’objectif est de permettre aux gestionnaires de lieux de diffusion d’acquérir une meilleure connaissance de leur public et d’optimiser leur taux de remplissage en ajustant leurs propositions de valeur (prix, horaire, contenu).
Des enjeux de gestion de l’affluence du public qui sont d’autant plus critiques que l’on doit gérer l’affluence de public avec des contraintes de distanciement social.
La data mais aussi la réalité virtuelle et augmentée, …, et même, hé oui, la blockchain dans le futur de l’art.
Les innovations ayant trait à l’image au sens large commençaient déjà « avant » à être utilisées : la réalité virtuelle ou augmentée a déjà démontré un fort potentiel de valeur ajoutée pour une cible restreinte d’early adopters : les salles d’arcade, les musées, les galeries d’art ou les acteurs de l’événementiel. Un exemple pour tous : le magnifique musée MORI à Tokyo, théâtre de l’art numérique, devenu une attraction majeure pour la capitale japonaise.
Le marché de l’art digital et la digitalisation du marché de l’art avaient commencé également à se développer, tirés par les millennials, friands d’art et digital natives, la convergence entre finance et art, la sécurisation apportée par la blockchain dans la transmission des data et l’émergence de quelques start-up comme Brig.th, Wünder ou Noow Art … Malgré des résistances qui persistaient.
Dans le monde d’« après » la digitalisation des œuvres d’art et l’art digital lui-même ne pourront qu’être renforcés. Les institutions culturelles et artistiques ont déjà mis en ligne un patrimoine énorme d’œuvres artistiques et l’art numérique connaît de plus en plus d’estimateurs, séduits par une expérience et une manière de « vivre » l’art différente.
Le monde de l’art est confronté à la nécessité de repenser son business model à partir de ses « clients »
Mais il reste une question fondamentale : celle du business model.
Question cruciale pour deux raisons : car le modèle fondé sur le soutien public à la culture est mis à rude épreuve par la crise actuelle qui puise dans les ressources publiques les moyens nécessaires à soutenir et relancer l’ensemble des secteurs économiques, et car la mise à disposition gratuite des œuvres d’art, a fortiori avec la réduction des subventions publiques, n’est plus viable économiquement.
La bonne nouvelle est que certaines organisations culturelles ont saisi l’opportunité de cette parenthèse imposée par le COVID pour repenser leur business model et leur parcours clients afin de prendre en compte les nouvelles règles de la société « sans contact » mais également pour continuer à faire évoluer l’expérience client dans toutes ses étapes, avant, durant et après les rencontres artistiques.
C’est le cas, par exemple de Chroniques, biennale des imaginaires numériques, portée par Seconde Nature et Zinc avec qui nous avons travaillé, en binôme avec risingSUD, étape par étape en partant des besoins de leur clients (qui ne sont pas que des visiteurs …) afin de construire une offre plus adaptée, omnicanale, qui leur permette de mieux piloter leur activité et de s’investir dans de nouveaux projets, en tirant profit au maximum des nouvelles technologies. Un travail qui a pris en compte l’ensemble des briques de leur Business Model et également les questions organisationnelles et les nécessaires interfaces entre les équipes, en mode agile et avec une vision holistique de leur projet.
Rarement nous avons constaté autant d’enthousiasme et d’engagement qui, nous espérons, seront primés par une large présence de visiteurs, mais (même ?) à distance … D’autant plus que Chroniques est la seule manifestation d’envergure maintenue à cette date en Région SUD.
La Biennale se tiendra entre le 12 novembre au 17 janvier 2021.
L’art est un incroyable observatoire de la société et de l’innovation et contribue à construire notre vision du monde. Et aussi du monde de l’ « après ».